mercredi 18 novembre 2009

Combien d'univers multiples dans l'Univers ?


Il y aurait environ 10^10^10^7 univers multiples... Et peut-être autant de versions parallèles de votre personne. Malheureusement, nos capacités cérabrales limitent drastiquement notre perception. De quoi frustrer les fans de science-fiction.


Selon Bettini Stefano du CNRS, « les scénarios d'univers multiples sont monnaie courante dans la physique des hautes énergies et en cosmologie, bien que bon nombre de spécialistes les considèrent comme des spéculations audacieuses. Quoi qu'il en soit, il n'existe pas de théorie unique ou de modèle unifié d'univers multiple. On trouve plutôt un nombre considérable de propositions théoriques qui sont mutuellement incompatibles. Ce qui est commun à tous ces scénarios, c'est l'existence postulée de plusieurs régions causalement disjointes de l'espace-temps (ou même d'espace-temps complètement séparés les uns des autres) et le fait de considérer l'univers observable comme étant atypique dans une perspective globale. »

En fait, la recherche fondamentale en physique a souvent recours aux univers multiples pour expliquer des phénomènes comme la fameuse matière noire ou les super-cordes, pour ne citer que ceux-ci.


D'où viendraient ces univers multiples ? Un petit roman de nos origines cosmiques s'impose... Avec ce qu'il faut de simplification et de terminologie en vogue histoire d'offenser les puristes de la physique. J'en rigole déjà.

Le Big Bang fut d'abord et surtout « une singularité » qui généra des fluctuations quantiques dans l'état primaire de notre univers. Dès ses premières nanosecondes, l'univers connut une phase d'hyper-inflation dans laquelle « des pertubations initiales furent gelées », créant différentes conditions initiales dans plusieurs régions du cosmos qui aurait chacune leurs propres lois de la physique. D'où l'idée d'univers multiples ou plus simplement d'Univers multiple (multiverse en anglais)...

... D'où l'hypothèse sci-fi selon laquelle d'autres versions de nous-mêmes existeraient dans ces univers parallèles qui, de temps à autre, s'interconnectent et offrent des opportunités de passage à celui disposant de la technologie adéquate. Pour plus de détails, veuillez consulter les professeurs Walter Bishop et William Bell. Dans la mesure du possible, évitez un monde bassement terrestre dans lequel l'Allemagne nazie aurait développé l'arme atomique en pôle position.

Combien d'univers multiples sont apparus lors des premiers instants du cosmos ? Les physiciens Andrei Linde et Vitaly Vanchurin postulent que leur nombre est proportionnel aux effets causées par les pertubations initiales et dépend fortement de ce que nous définissons comme univers multiple. Après maints calculs fondamentalement inacessibles à nos misérables cervelets, les deux esprits établissent que le nombre de variations possibles de ces pertubations détermine le nombre maximal d'univers multiples... Qui s'éleverait à environ 10 puissance 10 puissance 10 puissance 7 (10^10^10^7) soit 1 suivi de 700 zéros !

Combien d'univers multiples pouvons-nous observer ? La réponse n'est pas si simple car les capacités de traitement de l'information par l'observateur entrent considérablement en jeu, et ce, compte tenu du volume maximal d'informations qui peut être contenu à l'intérieur de n'importe quel volume d'espace (cf. la limite de Bekenstein) et des limites du cerveau humain.

Selon les deux professeurs de Standford, si notre cerveau absorbe un volume maximal de 10^16 bits d'informations durant toute notre vie terrestre, il dispose donc d'un maximum de 10^10^16 configurations différentes. Consécutivement, il ne peut percevoir plus de 10^10^16 réalités différentes de la nôtre, ne peut mémoriser autant de données afférentes et ne peut encore moins appréhender les effets inhérents à la dilation relativiste du temps sur une telle échelle.


10^10^16 configurations cérébrales différentes, c'est déjà pas mal. 10^10^10^7 univers multiples, c'est beaucoup trop pour vous, pauvres mortels ! En plus clair, les fantastiques aventures de Star Wars, de Star Trek, de Stargate et de Battlestar Galactica n'ont eu lieu que dans notre univers connu et/ou imaginable. Minable.

Nos capacités biologiques nous limitant donc à 10^10^16 univers multiples, les académies scientifiques feraient bien de recruter illico des professeurs extraterrestres provenant de civilisations scientifiquement et technologiquement très supérieures à la nôtre. Pour ma part, afin de mieux appréhender ces casse-têtes multiples, je me contenterais amplement d'un dîner avec la ravissante cylonne Numéro Six ou la charmante agente Olivia Dunham du FBI dans quelque univers alternatif proprement désert...

En savoir plus :

  1. Andrei Linde, Vitaly Vanchurin : How many universes are in the multiverse?

  2. Bettini Stefano : A cosmic archipelago : Multiverse scenarios in the history of modern cosmology (Presses Universitaires du Mirail-Toulouse)

  3. The Epoch Times : Multiple Dimensions: Between Superstrings and Parallel Worlds

  4. Anthony Aguirre, Max Tegmark : Multiple universes, cosmic coincidences, and other dark matters


vendredi 6 novembre 2009

Du logiciel-espion au raid aérien

Comment le Mossad a-t-il obtenu les plans détaillés d'une installation nucléaire syrienne ultra-secrète ? En piratant l'ordinateur portable d'un officiel syrien avec une clé USB, selon Der Spiegel.


Automne 2006. Ignorant complètement qu'il était suivi de près par les renseignements israéliens depuis son arrivée à Londres, un haut responsable syrien s'installa dans un hôtel près de Kensington et fit preuve d'une incroyable imprudence: il quitta sa chambre pour la soirée sans emporter son PC portable. Constatant son absence, les agents hébreux s'introduisirent dans ses appartements, trouvèrent son ordinateur et copièrent aisément toutes les données recherchées... Qui n'étaient même pas cryptées ! Grâce à un logiciel-espion sur clé USB, les données « aspirées » furent directement transmises à des ordinateurs du Mossad basés dans la capitale britannique. S'agissait-il d'une version améliorée de CSI USB Stick à très haut débit de transfert et connectable à un réseau sans fil sécurisé (wi-fi, GSM, CDMA, etc) ?


Le Mossad ne fut point déçu: localisation précise à Al Kibar, maquettes, phases successives de construction, canalisations, station de pompage, conduites d'évacuation, installations internes, etc. Le tout agrémenté de centaines de photos numériques prises à l'intérieur et à l'extérieur de la petite centrale nucléaire ! Dans cette orgie d'informations à très haute valeur ajoutée, les renseignements israéliens identifièrent facilement Chon Chibou et Ibrahim Othman: le premier est une figure de proue du programme nucléaire nord-coréen et ingénieur-en-chef à la centrale nucléaire de Yongbyong, le second est le directeur du Commissariat à l'Énergie Atomique syrien. Aussitôt, tous les voyants du Mossad et d'AGAF HaModiin (renseignements militaires israéliens) concernant la Syrie passèrent au rouge. Ces informations de source numérique furent complétées par la CIA (grâce à un transfuge iranien clé), par les renseignements électroniques d'AGAF HaModiin et par le satellitte israélien Ofeq-7. En septembre 2007, l'Israeli Air Force effectua un raid particulièrement ingénieux qui détruisit complètement l'installation nucléaire syrienne.


Au-delà des aspects technologiques et militaires, on peut s'interroger sur la culture cybersécuritaire des hauts fonctionnaires syriens, qui commettent exactement les mêmes imprudences que leurs homologues des cinq continents et de nombreux cadres du sci-tech/militech. En s'éloignant significativement de leurs PC portables/PDA et donc de leurs données confidentielles trop souvent non-cryptées, ils déroulent un immense tapis rouge aux cyber-espions qui n'en demandaient pas tant. Le redoutable logiciel-espion USB Evil Maid – pour ne citer que celui-ci - n'a pas été nommé ainsi par hasard: il a été conçu précisément pour être utilisable par une femme de ménage (maid en anglais) ayant quelques notions d'informatique.

Dès lors, si vous exercez dans un secteur sensible et/ou hautement concurrentiel et négligez grandement votre cybersécurité personnelle et professionnelle, à l'avenir, ne soyez point surpris par ce produit rival qui tombe à pic, ce sabotage subi à un moment fatidique, cette compétitivité qui s'effrite... Ou ce raid ennemi qui fait mouche au premier coup.


Lors de la lecture du remarquable article Der Spiegel couvrant quasiment toute l'opération israélienne, mon attention a également porté sur l'intégration volontaire ou indirecte du cyber-espionnage low-tech dans un tout cohérent comprenant renseignement (de source humaine/électronique), diplomatie, stratégie militaire et conduite des opérations.


En savoir plus :

  1. Der Spiegel: How Israel Destroyed Syria's Al Kibar Nuclear Reactor

  2. Haaretz: Mossad hacked Syrian computer to uncover nuke site

  3. Électrosphère: Le raid cyber d'Israël en Syrie

  4. Électrosphère: Le cyber-espion préfère Evil Maid (sur clé USB)