Enseignant à Sciences
Po, Pierre Conesa est l'auteur de “Surtout
ne rien décider. Manuel de survie en milieu politique”,
ouvrage qu'il résume comme suit : "l'art de la non-décision
consiste à agir avec méthode et savoir-faire, assurance et
détermination afin de laisser les inévitables réformes aussi
intactes que possible à ses successeurs."
Lors de sa succulente
conférence à l'ANAJ-IHEDN (1h20mn), il énonce quelques principes de la vie
politique : 1/ Le long terme en politique est la prochaine échéance
électorale. 2/ En politique, se méfier de ses amis plutôt que de
ses ennemis. 3/ Le réformateur est un zébulon inmaîtrisable et
dangereux qu'il faut tuer (politiquement). 4/ La réforme crée des
inimitiés durables alors que la subvention ne tâche personne et
crée des amitiés : toujours penser à la subvention. 5/ Un homme
politique d'avenir est un homme qui promet. 6/ Un homme politique
n'est mort que s'il est biologiquement décédé. 7/ Tout homme
politique accusé de corruption est présumé innocent jusqu'à ce
qu'il soit réelu.
Entre humour décapant et
lucidité à tout crin, l'ancien adjoint au Directeur de la
Délégation aux Affaires Stratégiques explique "pourquoi faire
aujourd'hui ce que les autres peuvent être contraints de faire
demain" en quelques principes :
1er principe : Démonter
la prétendue urgence de la réforme.
2ème principe : Enoncer
des principes ambitieux et généreux qui expliquent la lenteur et la
complexité de la réforme.
3ème principe : Etudier
bien et longuement le problème : commissions, haut conseil, haute
autorité, etc.
4ème principe : Toujours
communiquer pour expliquer l'inaction : novlangue, complexité
juridique, exemples étrangers non-transposables, etc.
5ème principe : Quand
toutes les voies de l'inaction ont été explorées, il reste à
créer de la complexité.
Ainsi, on constate
quelques dossiers typiquement français (qui s'accumulent sur les
tables basses des cabinets ministériels) en instance permanente
depuis plus de trente ans : la réforme des professions
protégées, la réforme des retraites, la réforme de l'éducation
nationale, le statut des fonctionnaires, la réforme de la PAC, le
statut de la presse, les aides à la presse, le cumul des mandats,
les tribunaux de commerce (dont les greffiers gagnent 30 000 €/mois
!), etc.
Quelques
années plus tôt, j'avais énormément apprécié un ouvrage de
Pierre Conesa titré “La
Fabrication de l’ennemi : ou comment tuer avec sa conscience pour
soi” (Ed Robert Laffont, 2011),
qui conserve toute sa pertinence au regard de l'actualité
internationale. En 2013, cet agrégé d'histoire avait obtenu le prix
de l'impertinence pour cette petite phrase : "En
polique le ridicule ne tue pas, seule la réforme est létale."
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